Les 10 romans marocains de langue française à ne pas rater
20 août 2023
Littérature

Ceci n’est qu’une suggestion de meilleurs romans marocains en langue française, que j’ai lus et aimés et que je partage avec les lectrices et les lecteurs de LPM. Bonne lecture!

1 - "La civilisation, ma mère !" de Driss Chraibi

Deux fils racontent leur mère, à laquelle ils vouent un merveilleux amour. Le plus jeune d’abord, dans le Maroc des années 30. Menue, fragile, gardienne des traditions, elle est saisie dans des gestes ancestraux, et vit à un rythme lent, fœtal. Radio, cinéma, fer à repasser, téléphone deviennent des objets magiques, prétexte d’un haut comique. Puis Nagib, le frère aîné, prend le relais. Durant les années de guerre, la mère s’intéresse au conflit, adhère aux mouvements de libération des femmes et, globalement, de son peuple et du Tiers Monde. Elle en est même le chantre. Elle sait conduire, s’habille à l’européenne, réussit tous ses examens. Elle est toujours semblable : simple et pure, drôle, et toujours tendre.

2 - "Rêves de femmes : Une enfance au harem" de Fatima Mernissi

Je suis née en 1940 dans un harem à Fès. » Ainsi commence le récit de Fatima Mernissi, évocation d’une enfance dans la médina d’une des cités les plus prestigieuses du Maroc.
À travers le regard curieux et volontiers frondeur d’une petite fille, c’est à une plongée dans l’univers clos des femmes que nous convie l’auteur. Des plus traditionnelles aux déjà féministes, anciennes esclaves ou combattantes contre les Français ou les Espagnols, conteuses puisant leur répertoire dans Les Mille et Une Nuits, amoureuses des chanteurs égyptiens, elles rêvent sur les terrasses de Fès à un monde où il n’y aurait plus de barrières, où l’espace serait désormais ouvert.
Un récit enchanteur en forme de conte où le réel et l’imaginaire, le merveilleux, l’humour et le tragique tissent un quotidien borné aux limites du harem. Y filtre malgré tout le vent de l’histoire, de l’indépendance, et d’un avenir où leurs filles auront leur place et un destin à la hauteur de leurs rêves.

3 - "Le pain nu" de Mohamed Choukri

Une famille, dans le Maroc des années 40, quitte le Rif pour Tanger. Afin d’échapper à l’écrasante tutelle du père, auquel ses enfants vouent une haine sans partage, le narrateur s’éloigne bientôt des siens. Il connaît la famine, les nuits à la belle étoile, et rencontre la délinquance, les amitiés nouées dans les bas-fonds de la ville, la sexualité, la prison, la politique. Quinze ans après la parution du Pain nu, la voix de Mohamed Choukri apparaît toujours comme celle d’un écrivain majeur.

4 - "Moha le fou, Moha le sage" de Tahar Ben Jelloun

Qui, au Maghreb, ne connaît Moha ? On l’a entendu déclamer sur une place publique. On l’a vu déchirer de vrais billets devant une banque. Il a tiré au clair l’étrange histoire d’une ancienne et puissante famille, su le secret de l’esclave noire et celui de la petite domestique, chacune interdite de parole. Il a pris à partie le technocrate et le le psychiatre, conversé avec Moché, le fou des Juifs, et avec l’Indien, cet autre exclu.
Arrêté, tué, enterré, Moha ne cesse de parler – et sa parole ne peut tarir car elle est la tradition maghrébine même, la vérité lyrique qui résiste.
Moha raconte son peuple, Tahar Ben Jelloun raconte Moha : allez donc arrêter le vent sur les sables.

5 - "Zaynab, reine de Marrakech" de Zakya Daoud

 » L’endroit est d’une beauté exceptionnelle. La vaste plaine est barrée à l’horizon par les montagnes formidables de l’Atlas et leurs sommets neigeux. Au fond, elle bute sur de petites collines pierreuses, et sur celle, plus basse, des esclaves noirs. Au-delà s’étendent les plaines convoitées par les cavaliers du désert qui veulent y porter la bonne parole.
Dans ce long espace de lumière borné d’un côté par les neiges, de l’autre par le feu, tout se transforme en un instant.  » Les dés sont jetés: c’est là que sera fondée Marrakech, en l’an 1062.  » Zakya Daoud s’essaie avec bonheur au genre romanesque…

6 - "Le ciel sous nos pas" de Leïla Bahsaïn

Dans ce premier roman plein d’énergie aux allures de conte moderne, Leila Bashain, lauréate du prix de la Nouvelle de Tanger 2011, évoque dans une langue sensuelle, insolente et métissée, le parcours d’une jeune marocaine, depuis son enfance dans son pays natal à son arrivée en France. Décomplexée vis- à-vis des hommes et de l’Occident, elle va vivre mille aventures, telle une Zazie moderne, entre rires et larmes ! Et briser un tabou : le pays des Lumières n’est pas la partie rêvée des droits de la femme maghrébine.

7 - "Maroc : Voyage dans les royaumes perdus" de Mustapha Kharmoudi

A la fin du XVIIIe siècle, un jeune Français s’engage malgré lui dans un voyage périlleux à travers l’Empire du Maroc, obstinément fermé alors aux nations chrétiennes d’Europe. Il est aussitôt pris dans les tourbillons de la fin du règne du sultan Mohamed Ben Abdallah et des guerres de succession qui s’ensuivent. Au-delà de la fiction romanesque, c’est toute l’histoire du Maroc et des Marocains, princes et paysans, qui s’offre au lecteur sous une plume avisée et sans complaisance.

8 - "Vivre à ta lumière" de Abdellah Taïa

Trois moments dans la vie de Malika, une femme marocaine de la campagne. De 1954 à 1999. De la colonisation française à la mort du roi Hassan II.
Son premier mari est envoyé par les Français combattre en Indochine.
Dans les années 60, à Rabat, elle fait tout pour empêcher sa fille Khadija de devenir bonne dans la villa de Monique.
La veille du décès de Hassan II, un jeune voleur homosexuel, Jaâfar, entre chez elle et veut la tuer.
C’est Malika qui parle ici. Tout le temps. Elle raconte avec rage ses stratégies pour échapper aux injustices de l’Histoire. Survivre. Avoir une petite place.

9 - "Le fou du roi" de Mahi Binebine

Je suis né dans une famille shakespearienne. Entre un père courtisan du roi pendant quarante ans et un frère banni dans une geôle du sud. Il faut imaginer un palais royal effrayant et fascinant, où le favori peut être châtié pour rien, où les jalousies s’attisent quand la nuit tombe.
Un conteur d’histoires sait que le pouvoir est d’un côté de la porte, et la liberté de l’autre. Car, pour rester au service de Sa Majesté, mon père a renoncé à sa femme et ses enfants. Il a abandonné mon frère à ses fantômes. Son fils, mon frère, dont l’absence a hanté vingt ans ma famille. Quelles sont les raisons du « fou » et celles du père ?
Destin terriblement solitaire, esclavage consenti…
Tout est-il dérisoire en ce bas monde ? Mon père avait un étrange goût de la vie. Cela fait des années que je cherche à le raconter. Cette histoire, je vous la soumets, elle a la fantaisie du conte lointain et la gravité d’un drame humain.

10 - "Triste jeunesse" de Mohamed Nedali

Dans son nouveau roman, très justement intitulé Triste jeunesse, Mohamed Nedali dresse un portrait de la jeunesse marocaine désabusée : on ne peut pas travailler, on ne peut pas s’aimer, on est condamnés à la pauvreté et à la souffrance. Saïd aime Houda, Younès aime Latifa. Dès l’évocation de ces histoires d’amour, on prévoit le drame. Celui-ci revêtira plusieurs facettes, mais aux yeux de Nedali, il est inéluctable. Sombre roman donc, mais la volonté de son auteur est claire : ce prof de lycée ne supporte plus l’état d’esprit de ces jeunes persuadés que leur sort est joué avant même qu’il ne commence. C’est un cri d’alarme mais aussi une formidable façon de leur dire que la vie ce n’est pas ça : la vie c’est un combat de tous les jours, et cela peut être une victoire.